Pour entamer des études de médecine, faudra-t-il réussir un test d’aptitude, un concours, un examen d’entrée ? Cette question a été au centre d’un mini-débat en séance plénière du Parlement de la Communauté française. Comme l’a souligné Daniel Senesael, le test d’aptitude préconisé par d’aucuns pose question : « N’est-il pas à craindre de le voir se transformer en examen d’entrée déguisé, en donnant ainsi un accès prioritaire à d’aucuns ? Comme on a pu le lire dans la presse, il ne faudrait pas qu’une « implacable machine à exclure » augmente l’injustice sociale ».
On trouvera ci-après des extraits de la réponse bien intéressante du Ministre Jean-Claude Marcourt : « L’instauration d’un numerus clausus pour les études de médecine – il est également appliqué en dentisterie et c’est l’occasion de souligner que l’augmentation en dentisterie est nettement plus importante proportionnellement qu’en médecine – a créé une situation d’exception, en contradiction avec l’esprit même de l’université et de l’organisation de l’enseignement supérieur, dans l’espace Bologne et en Communauté Wallonie-Bruxelles, en particulier ».
Jean-Claude Marcourt a dénoncé les effets pervers du numerus clausus: « Les effets pervers du numerus clausus sont multiples. J’en reprendrai quelques-uns : l’enfermement des étudiants dans une filière professionnalisante, sans possibilité de mobilité en cours d’études, de valorisation des crédits et de compétences acquises dans d’autres filières, de réorientation vers la médecine – elle n’existe que dans l’autre sens, pour les reçus-collés ; l’absence de tous les mécanismes d’aide à la réussite, d’orientation progressive, de remédiation ou d’étalement, c’est-à-dire de rythme personnalisé des études, en vigueur dans toutes les autres filières, puisque le système du numerus clausus est conçu pour éliminer ; le poids du contrôle, de la sélection précoce, des contraintes externes qui dénature dans ces filières la raison même d’une université chargée de la formation scientifique de diplômés polyvalents ; l’état d’esprit et le comportement qui se développent parfois parmi les étudiants soumis à cette règle du struggle for life et que l’on pourrait même qualifier d’inciviques, cette compétition acharnée, en contradiction avec l’esprit de la démarche solidaire et empathique qui est attendue d’un futur médecin »
Pour le Ministre, il faut faciliter l’accès à des études comportant pour les médecins généralistes 6 années de formation générale et 3 années de spécialisation: « Je souhaite réellement garantir la qualité de la formation, mais je ne veux pas que trop de jeunes étudiants soient condamnés à l’échec. Nous devons rechercher, ensemble, le moyen de faciliter l’accès aux études et de lutter contre l’échec scolaire, tout en maintenant l’excellence de la formation de nos médecins Cette spécialisation est fixée à trois années, à l’échelon européen.
Ce rattachement de la dernière année de formation générale à deux années supplémentaires de spécialisation pour l’obtention du diplôme de médecin généraliste a été jugé illégal. En effet, il est discriminant par rapport aux autres spécialisations. Donc, si nous souhaitons maintenir à neuf ans la durée des études de médecine générale et que la spécialisation doit être portée à trois ans, la formation générale devra passer à six. Le postulat de départ est bien celui d’un maintien à neuf ans ».
Pas d’examen d’entrée comme en Flandre, pas de concours comme en France, pour le Ministre qui défend le libre accès aux études.: "En Communauté française, nous pratiquons le libre accès aux études et j’estime que cette option mérite d’être défendue car elle est plus humaine et plus équitable. Elle permet à l’étudiant d’éventuellement compenser, au cours de sa première année, l’inégalité qui peut exister à l’issue des études secondaires.
Il conviendrait d’imaginer un système qui combine divers éléments favorables à la réussite du plus grand nombre. Les doyens des facultés de médecine ont proposé un test d’aptitude ».
Un test d'aptitude qui ne devrait pas être un obstacle, selon Jean-Claude Marcourt: « Si nous choisissons cette voie, ce ne sera qu’à la stricte condition qu’elle ne soit pas un obstacle à l’inscription mais simplement une manière de donner à l’étudiant des informations sur ses forces et faiblesses au moment où il pose un choix majeur de son existence.
Ce test ne pourrait se concevoir qu’accompagné d’activités de remédiation, de guidance et de tutorat qui aident l’étudiant à pallier ses déficiences.
Il faudrait également mettre en oeuvre des formations préparatoires destinées aux élèves du Secondaire (…). Dans l’esprit du processus de Bologne, il serait important d’offrir la possibilité de valorisation de crédits, de reports de notes, de dispenses permettant les réorientations, notamment l’accès aux études de médecine après la réussite d’une première année universitaire dans un domaine proche. La presse a indûment qualifié cette possibilité d’année préparatoire. Ce serait plutôt une vraie première année qui ouvrirait la voie à une deuxième année dans certains cycles.
L’École de santé a été évoquée dans le cadre d’une réflexion globale. Tous ont souligné l’urgence de prendre attitude. En tout cas, le numerus clausus ne sera pas réinstallé. »
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