C'est une journée à marquer d'une pierre blanche car pour la première fois, sous un même mot d’ordre syndical (« Contre l'austérité, pour un nouveau contrat social européen !»), des grèves et des manifestations solidaires ont mobilisé, dans quasiment tous les pays de l'Union européenne, les travailleurs et les victimes de l'austérité contre la politique de l'Union européenne.
Un petit bémol cependant : en Belgique, les actions syndicales ont eu lieu en ordre quelque peu dispersé. Il est vrai que le monde syndical est loin d'être monolithique et que les grands bastions syndicaux sont en perte de vitesse.
D’accord, c’est encore un peu mou mais on fera mieux et plus fort demain tant au niveau de l'Europe au niveau de la Belgique !
Tous ces grévistes et ces manifestants veulent que l’on sorte du cercle vicieux d'un assainissement brutal et forcené des finances publiques, sous la tutelle des marchés financiers et d'une Allemagne intransigeante, dans des délais impossibles à tenir.
Une telle politique fait des millions de victimes parmi les allocataires sociaux, les travailleurs, les commerçants et autres indépendants et elle fait plonger un peu plus la consommation des ménages, la production des entreprises et les finances des Etats.
Ils ne veulent pas d’un traité budgétaire qui cadenasse les politiques nationales et le peu de marge de manœuvre budgétaire qui reste encore aux Etats.
(Beaucoup de jeunes, place Saint-Paul, ce 14 novembre 2012!)
Ces grévistes et ces manifestants veulent aussi que l'Union européenne prenne des mesures efficaces pour briser les liens entre nos banques et les paradis fiscaux, pour réguler et contrôler les marchés financiers, pour proscrire certains mécanismes spéculatifs et l'utilisation de produits financiers toxiques comme les CDS.
Ils revendiquent une lutte efficace contre les stratégies d’évasion fiscale utilisées par les multinationales, une séparation entre les activités spéculatives des banques et leurs activités de dépôts utiles à l'économie, une fiscalité plus juste et plus progressive de même qu'une taxe digne de ce nom sur les transactions financières, etc., etc.
Des économistes de haut vol dénoncent depuis des années une politique d'assainissement qui repose sur une diminution drastique et insupportable des dépenses publiques et des protections sociales, une politique qui aggrave les inégalités. Malheureusement, ce ne sont pas ceux-là que l'on consulte le plus et qu'on interviewe le plus dans les médias et instances de décision!
Certes, des mécanismes de solidarité (intervention sur les marchés, rachat ou réduction de dettes publiques, diminution de taux d’intérêt, etc.) ont été mis en place à l'échelon européen mais à quel prix ? Avec quels atermoiements et quels retards ?
On reste loin du compte…
Dans mon édito du 13 janvier 2012, j’écrivais ceci : « Comment ne pas voir dans les derniers développements de la crise une opportunité de plus pour le néolibéralisme de consolider ses assises avec moins de service public et de protection sociale, avec plus de flexibilité et de précarité pour bon nombre de travailleurs salariés, de travailleurs indépendants et d’allocataires sociaux? »
Moins d’Etat, un droit du travail dérégulé et une main d’œuvre fragilisée par les mesures d’austérité et donc taillable et corvéable à merci : ces objectifs poursuivis par la droite européenne pure et dure sont en passe d’aboutir. C’est aussi celui de la N-VA et des libéraux flamands…
(Devant l'immeuble de la FGTB, place Saint-Paul, ce 14 novembre 2012... L'occasion de me rappeler les années professionnelles et militantes que j'y ai passées comme directeur de l'Office de droit social de 1979 à 1985, des années noires sur le plan social mais riches de mobilisation syndicale...)
J’ai vu le documentaire consacré à la City de Londres, ce haut lieu des magouilles et des escroqueries financières, base privilégiée des requins financiers et autres spéculateurs cyniques et arrogants…
Un documentaire qui apporte encore, s’il en était besoin, de l’eau au moulin de ceux qui dénoncent l’opacité des marchés financiers, les liens entre nos banques et les paradis fiscaux, la spéculation sur la dette des Etats, les manipulations des taux d’intérêt (voir le scandale du Libor), etc.
Etonnant qu’il n’y ait pas eu plus de casse lors des manifestations londoniennes contre les mesures d’austérité !
Que font les partis de gauche au niveau européen ? Il est vrai qu’entre certains travaillistes anglais, certains sociaux-démocrates allemands, les socialistes français, espagnols et belges par exemple, il y a plus que des nuances, sans compter la tentation du repli sur soi !
Où est la gauche qui peut aider les victimes de cette crise à ouvrir les yeux sur les abus qui les entourent, sur l’absence de justice fiscale ? Quelle est la gauche qui peut faire entendre un discours mobilisateur et susciter la révolte ?
J. Gennen, 23 novembre 2012
(Les métallos liégeois étaient présents en nombre, à la veille d'une nouvelle épreuve de force avec ArcelorMittal!)
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