(Exposition Knitting Dolls au Grand Atelier, CEC La Hesse, Rencheux-Vielsalm. Une oeuvre d'Annemie Depaepe, d'après un dessin d'Adolpho Avril)
En séance du 15 novembre 2010 de la Commission de la Jeunesse et de l’Aide à la jeunesse du Parlement de la Communauté française, Malika Sonnet est revenue à la charge à propos de l’accompagnement psychiatrique des mineurs délinquants.
Marc Elsen a fait de même tout en s’appuyant sur le rapport de la Table ronde initiée par la Fondation Roi Baudouin (« Quelles priorités dans les réponses à la délinquance juvénile », 30 septembre 2010) dans lequel on souligne « le besoin grandissant d’une prise en charge professionnelle des aspects psychiques et psychiatriques de la délinquance juvénile ».
Une préoccupation commune aux deux parlementaires : dispose-t-on des moyens, des services spécialisés et du personnel qualifié pour garantir un tel accompagnement ?Evelyne Huytebroeck a fait le point sur l’offre en milieu hospitalier et résidentiel psychiatrique et sur les équipes mobiles qui en dépendent. Elle a confirmé l’ouverture prochaine de trois nouvelles unités de traitement intensif et le rôle des centres d’orientation éducative et des services de santé mentale.
La Ministre a souligné le rôle des équipes d’ «outreaching » (un anglicisme qui a dû faire trembler les murs du Parlement de la Communauté française), ces équipes mobiles qui assurent un suivi psychiatrique dans le milieu naturel des personnes et qui se sont développées dans le cadre d’initiatives spécifiques proposant une alternative à l’hospitalisation.
Evelyne Huytebroeck a insisté sur le caractère supplétif et complémentaire du secteur de l’Aide à la jeunesse : les mineurs souffrant de troubles psychiatriques ne devraient pas se retrouver dans les services de l’Aide à la jeunesse.
Cela posé, la Ministre a dit privilégier des solutions ambulatoires et des collaborations avec des services d’ «outreaching », les services de l’Aide à la jeunesse pouvant accueillir ces jeunes s’ils suivent un traitement adapté et si le personnel est soutenu par une équipe mobile.
Elle a confirmé la mise en place d’un groupe de travail associant les cabinets d’Eliane Tillieux et de Laurette Onkelinx.
Tout cela est-il bien cohérent ? Pas évident…
C’est l’occasion de citer un extrait du rapport de la Table ronde : «Le manque de cohérence, de connaissance réciproque et d’articulation intersectorielle (AWIPH, Commission Communautaire Française, Santé mentale, Aide à la jeunesse,…) aboutit maintes fois, constate-t-on, à des prises en charge parfois inadéquates des jeunes et à des errements de ceux-ci de secteur en secteur. »
Un rapport qui souligne encore l’importance de la mise en réseau et de la transversalité et qui dénonce «la tendance qui consiste à morceler les mesures à travers les divers services impliqués », la plupart des professionnels insistant sur la nécessité d’intervenir dès les premiers signaux, sur la base d’une approche globale et cohérente sur le long terme (…).»
Rien de nouveau sous le soleil (qui ne brille pas pour un bon nombre des jeunes concernés) mais la volonté existe de changer les choses, malgré le parcours d’obstacles de notre maquis institutionnel.
Marc Elsen a également interrogé la Ministre Eliane Tillieux sur ses initiatives pour soutenir le suivi psychiatrique des jeunes en traitement ambulatoire et sur l’état de la réflexion sur ce suivi dans le cadre de la politique et des services de santé mentale.
C’était en Commission de la Santé, de l’Action sociale et de l’Egalité des chances du Parlement wallon, ce mardi 23 novembre 2010.
Eliane Tillieux a fait la distinction entre la prise en charge socio-éducative par les professionnels de l’Aide à la jeunesse et la prise en charge médicale et psychologique qui repose sur la continuité des soins, le respect du secret médical et la pratique du réseau de soins.
La Ministre a rappelé que la création de lits de traitement psychiatrique en milieu hospitalier (les lits « for K ») répondait à un besoin, dès lors qu’en IPPJ, les équipes constataient qu’une hospitalisation spécialisée était nécessaire, ne disposant pas elles-mêmes des ressources médicales et de traitements appropriés.
Elle a encore souligné le fait que près de la moitié des consultants des services de santé mentale ont moins de 18 ans. Il s’agit d’une spécificité wallonne, la situation étant toute différente en Flandre.
Eliane Tillieux a également rappelé les recherches-actions, études et concertations en cours. Elle a saisi la Conférence interministérielle « Santé » de la problématique des mineurs qui présentent un trouble psychique, ces mineurs étant soit délinquants, soit en danger.
Incontestablement, Eliane Tillieux est sensible à la question et veut faire bouger les choses…
Nul doute que le récent rapport du Centre fédéral d’expertise des soins de santé, le KCE, sur l’urgence psychiatrique pour enfants et adolescents, va relancer les débats.
Son constat n’est pas tendre à l’égard de l’organisation des services d’urgence psychiatrique pour les jeunes et les adolescents. Le trajet de soins est loin d’être balisé et cohérent…
Plus de 4000 enfants et adolescents sont hospitalisés chaque année pour des problèmes psychiques urgents (sans compter ceux qui sont suivis sans hospitalisation…). Ils sont toujours plus nombreux.
Le KCE recommande notamment la création de 15 structures de coordination, accessibles 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24, avec une priorité pour des prises en charge dans le milieu de vie.
Pour rappel, c’est seulement à partir du 1er janvier 2011 que des projets d’équipe mobile se concrétiseront dans le cadre de la réforme des soins de santé mentale (réforme « article 107 »). Cette réforme concerne les adultes et les mineurs âgés d’au moins 16 ans.
Jean-Pierre Closon, Directeur général et Raf Mertens, Directeur général adjoint écrivent ceci, en guise d’introduction au rapport du KCE : « Le secteur de la santé mentale est fort chahuté en Belgique. On souligne souvent le manque de pédopsychiatres, les centres de santé mentale se débattent avec les problèmes de file d’attente et, dans un pays aussi compliqué politiquement que la Belgique, la répartition des compétences rend une approche intégrée très peu évidente.
Et à tout cela s’ajoute l’impression que les besoins ou du moins la demande de soins de santé mentale sont en augmentation, en particulier chez les enfants et adolescents (…).»
L’enjeu est de taille et nécessite un projet politique d’envergure associant les instances de décision et les niveaux de pouvoir concernés.
Bien sûr, des partenariats et des mises en réseau existent, ici et là, de même que des initiatives associant étroitement le secteur de l’Aide à la jeunesse et celui de la Santé mentale.
A l’évidence, on est loin du compte, comme le souligne également un spécialiste de la question, Luc Fouarge, dans un article (« Jeunes et transversalité ») publié dans l’excellente revue Confluences (n°20, août 2008).
Qui sait ? Une réforme de l’Etat s’appuyant sur les régions pourrait peut-être faciliter ce projet politique…
Sans oublier qu’en amont de la souffrance psychique, il y a dans bon nombre de situations, une souffrance sociale liée à la grande pauvreté, à la précarité, à l’absence d’intégration sociale, culturelle et professionnelle.
Vivalia et le secteur de la santé mentale
Vivalia gère notamment un hôpital psychiatrique (le CUP de Bertrix), une unité de 30 lits « A » en hôpital général à Arlon, des structures résidentielles (30 places en maison de soins psychiatriques à Athus, et 16 places en habitations protégées à Bertrix.
L’Intercommunale luxembourgeoise collabore également avec les structures extrahospitalières (centres de santé mentale, services de soins psychiatriques à domicile, etc.).
Elle s’inscrit dans une réforme concertée de l’offre de soins psychiatriques visant à prendre en charge le patient dans son milieu de vie, en créant notamment deux équipes mobiles d’intervention, des lits de crise et des places résidentielles. Plus globalement, Vivalia veut contribuer à la création d’un véritable réseau de collaborations avec le secteur extrahospitalier.
J.G., 29 novembre 2010
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