En séance de la Commission des Affaires intérieures et du Tourisme du mardi 5 janvier 2010, Sébastian Pirlot (« mû par l’esprit de Noël », a-t-il dit !) a interrogé le Ministre Paul Furlan sur l'inculpation de membres du Collège et du personnel communal de la Commune de Libramont.
S. Pirlot a rappelé les faits : Le 26 novembre dernier, le juge d'instruction chestrolais Jacques Langlois a inculpé le bourgmestre de Libramont, le secrétaire communal, ainsi que plusieurs échevins de l'actuel et de l’ancien Collège communal.
Ceux-ci sont inculpés dans le cadre d'une prise d'intérêts relative à l'attribution de 11 chantiers de travaux publics entre 1996 et 2005, à une société dont l'administrateur délégué est le premier échevin en charge des travaux publics, également actionnaire de ladite société.
(Stéphane Hartman, Conseiller communal PS à Libramont n'a pas cessé de dénoncer le conflit d'intérêts!)
Le Député-Bourgmestre de Chiny a interrogé ensuite le Ministre sur les suites qu’il a réservées à ce dossier et a conclu : « En outre, M. le Ministre, nous apprenons également que le receveur communal avait attiré en 2003, à plusieurs reprises, l'attention de la tutelle sur les risques de ce conflit d'intérêts, sans susciter de réactions de la part du Ministre de tutelle de l'époque.
Cette information est-elle exacte ? Pouvez-vous nous dire sur quels éléments se fondait cette décision du Ministre de tutelle de ne pas annuler les marchés publics mis en cause ?»
Paul Furlan a rappelé que tant qu'on n'est pas au terme de la procédure judiciaire, c'est la présomption d'innocence qui prévaut, ce qui lui interdit, en l’état actuel des choses, d'envisager une quelconque sanction disciplinaire.
Le Ministre a notamment évoqué les sanctions disciplinaires qu’il pourrait prendre à l’égard des membres du Collège communal de Libramont, à l’issue de la procédure judiciaire : la suspension ou la révocation du bourgmestre et d’un ou de plusieurs échevins pour négligence grave ou inconduite notoire.
Paul Furlan : « Dans l'immédiat, ce qui m'inquiète le plus, c'est finalement la gestion sereine de la Commune de Libramont. Comment peut-on sereinement et indépendamment de la présomption d'innocence que je respecte, gérer une commune dans ces conditions ? ».
Et le Ministre de poursuivre en rappelant son devoir de neutralité politique et en indiquant qu’il appartient soit au conseil communal de voter une motion de méfiance collective, soit aux instances du MR d’apprécier la gravité des faits et d’intervenir en leur âme et conscience selon les statuts de leur Parti.
Paul Furlan a rappelé que le Ministre de tutelle de l’époque, Charles Michel (MR) avait été parfaitement informé de la situation en 2003 et que l’Administration lui avait confirmé qu’il y avait bien, selon elle, conflit d’intérêts.
Charles Michel s’était contenté de renvoyer la patate chaude au Collège lui-même en l’invitant à apprécier chaque dossier et à le lui soumettre (un peu comme si, avant d’entamer des poursuites pénales, un braconnier était d’abord invité par le Parquet à se dénoncer !).
On sait que lorsqu’il est devenu ministre, Philippe Courard n’a pas hésité à annuler, pour cause de conflit d’intérêts, 5 marchés attribués à la société Jérouville. Cette dernière décision a été annulée par le Conseil d'État pour une question de pure forme : la tutelle générale doit s'exercer dans un délai raisonnable (ce qui aurait pu se faire si Charles Michel avait pris ses responsabilités en 2003).
On sait aussi que Paul Furlan est depuis de longues années, l’excellent bourgmestre de la ville de Thuin. Jamais, comme il l’a laissé entendre, il n’aurait toléré qu’un membre du Conseil communal prenne part directement ou indirectement à un marché public communal.
Tout en rappelant son respect des institutions démocratiques, de l’autonomie locale et de la séparation des pouvoirs, le Ministre s'est demandé s'il n'était pas dangereux d’augmenter les pouvoirs de la tutelle, du ministre lui-même et de permettre une intervention disciplinaire avant que l’affaire ne soit définitivement close sur le plan pénal ? Poser la question, c'est y répondre ...
Comme l'a souligné le Ministre, le temps judiciaire, le temps politique ou le temps médiatique sont des choses différentes. D’où importance d’une intervention des partis dans l’attente d’une décision judiciaire qui peut intervenir au bout de plusieurs années de procédure …
Et d'ajouter: " Il m’apparaît que la sérénité, la crédibilité du monde démocratique local ne peuvent être affectées par le comportement de quelques-uns au mépris de la grande majorité qui se comporte en respectant l’intérêt général ".
Sébastian Pirlot: "Je remercie M. le Ministre pour ses réponses. Je ne vous cacherai pas, en tant qu'élu, que j'éprouve quand même un certain malaise, pour ne pas dire un malaise certain quant aux pseudo-arguments évoqués dans la presse par les élus libramontois pour justifier leur non-démission malgré leur inculpation.
Je ne résiste pas à la tentation de vous en citer quelques-uns, je cite : «c'est un complot politique » ou bien encore « c'est du passé et cela ne concernait que 3 millions d'euros, une paille, soit 1,9 % du budget », ou enfin, et c'est la plus belle, « c'est la faute de la tutelle provinciale et régionale factice qui nous a mal informés".
Sébastian Pirlot a poursuivi sa réplique en pratiquant le second degré: "Donc, je déduis que visiblement le collège n'était pas informé qu'un premier échevin en charge des travaux, par ailleurs actionnaire d'une société de travaux, ne pouvait pas superviser lui-même la rédaction d'un cahier des charges, ni soumissionner le marché et proposer de son chef à qui le marché devait être attribué. C'est dingue non ?"
Et de conclure: " En tant qu'homme politique, on fuit ses responsabilités en n'ayant pas le courage de démissionner et on ne contribue pas à rapprocher la gestion de la cité des citoyens, dans le cadre d'une gestion probe et transparente de leurs besoins ...".
Que dire et qu'écrire encore?
JG, 05.02.10
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