Une fin d'année 2011 plutôt schizophrénique !
Et oui, beaucoup de syndicalistes qui sont aussi membres du PS, ont été pris en 2011 dans une sorte de vertige schizophrénique.
Au cours de 40 ans et plus d'affiliation au PS et à la FGTB, j'ai connu cette situation à plusieurs reprises, à la veille de certains congrès mais sans doute jamais de manière aussi aiguë qu’en 2011.
Comme d’autres, c’est sans grand enthousiasme que j’ai soutenu la participation du PS au nouveau gouvernement fédéral et son adhésion à des programmes institutionnel et socio-économique dont certains aspects ne sont guère satisfaisants.
Ce n’était pas le moment de laisser tomber le PS.
La potion n’en est pas moins amère car beaucoup de militants ont eu l’impression de se faire avoir deux fois : une première fois par les tenants d'un capitalisme financier et d'une économie casino qui ont usé et abusé du système avec les conséquences que l'on sait sur les finances des Etats notamment ; une seconde fois par des mesures d'austérité généralisées partout en Europe qui nous mènent dans l'entonnoir de la récession.
Comment ne pas voir dans les derniers développements de la crise une opportunité de plus pour le néolibéralisme de consolider ses assises avec moins de service public et de protection sociale, avec plus de flexibilité et de précarité pour bon nombre de travailleurs salariés, de travailleurs indépendants et d’allocataires sociaux?
C'est la vision d'une société que les conservateurs américains défendent sans vergogne en ces temps de campagne électorale…
Bien entendu, des éditorialistes et autres économistes dominants nous ont bien bourré le crâne : comment faire autrement avec la dette des Etats, les lois du marché, la concurrence des pays émergents, les diktats des agences de notation, les ukases européens dictés par l'Allemagne ?
Et face à ces discours, une gauche européenne aux abonnés absents et peu de place pour un discours alternatif…
Oui, les temps sont durs et la situation de bon nombre de travailleurs salariés, de pensionnés, de chômeurs, de malades et de petits indépendants va sans doute s’aggraver dans les deux ans qui viennent…
(Sans les réactions syndicales, les mesures antisociales prises par le nouveau gouvernement fédéral auraient été bien plus lourdes! Photo d'archives: manif en front commun à Arlon)
La faute à pas de chance ? Non, évidemment.
La faute à l'endettement des Etats ? Trop simple comme explication !
La faute d'abord et surtout aux dérives d'un capitalisme financier débridé, aux spéculateurs de tous poils et à certaines banques qui ont pris d’incroyables risques financiers, ont usé et abusé de produits financiers toxiques et se sont ensuite sorties d'affaire grâce à l'aide des Etats et auxquels elles prêtent à présent à des taux d'intérêts bien trop élevés!
La faute aussi à l'absence de transparence et de régulation des marchés financiers !
Et le comble, c'est que, au lieu de s'unir pour mener des politiques communes de relance économique, pour soutenir la consommation des ménages et adopter des mécanismes efficaces et durables de régulation et de contrôle des activités de ces fameux « marchés financiers », les gouvernements des pays européens conduits par le bout du nez par Angela Merkel et Nicolas Sarkozy, s'enfoncent dans des politiques d'austérité contre-productives.
Notre gouvernement fédéral ne fait pas mieux que les autres. Il est vrai qu’il est difficile d’agir seul face au concert européen du moment.
Et si certaines mesures de son programme socioéconomique portent heureusement la marque des socialistes francophones et flamands, beaucoup de mesures antisociales portent la marque d’une droite pure et dure, flamande en particulier, qui domine ce gouvernement…
Rien n'est simple, j'en conviens mais on ne m'enlèvera pas de la tête qu'on ne fait pas payer assez les riches, les spéculateurs, les banques, Electrabel et les producteurs d’électricité de même que certaines grandes entreprises qui ne paient quasiment pas d'impôts tout en bénéficiant des fameux intérêts notionnels.
On ne m’enlèvera pas de la tête qu’un impôt sur la fortune aurait permis de ne pas prendre certaines mesures antisociales. Je comprends les réactions du monde syndical d’autant plus que les premières de ces mesures antisociales ont été prises à la hussarde !
Bon, ça m’a fait du bien de me lâcher un peu…
Bonne année quand même !
Jacques Gennen, 13 janvier 2012
(Au départ d'un édito publié sur www.salm.be, le 29 décembre 2011)
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