(Bon nombre de jeunes ont des relations affectives et sexuelles placées sous le signe de la violence, bien loin de la tendresse et de la sérénité de ces jeunes mariés...)
L’Evras (acronyme pour « Education Vie Relationnelle, Affective et Sexuelle ») à l’école, est l'objet de toutes les attentions des parlementaires wallons et de la Communauté française et des ministres concernés depuis tant d'années !
De résolutions en questions et interpellations parlementaires en passant par des engagements solennels et des appels à projets, cet objectif n'a cessé d'être remis sur le métier.
Ces derniers mois, au Parlement de la Communauté française et au Parlement wallon, il en a de nouveau été question à de nombreuses reprises.
Je vous renvoie à la chronique que j'ai consacrée à ces débats...
Certains établissements d’enseignement n’ont bien sûr pas attendu que les choses avancent…
Mais on est loin du compte!
Le 20 décembre 2006 (mais je pourrais rappeler bien d'autres prises de position précédant celle-ci), répondant à une question de Jean-Luc Crucke du 20 décembre 2006, Catherine Fonck, alors ministre de l’Enfance, de l’Aide à la jeunesse et de la Santé, dit ceci : « l’un des enjeux majeurs pour cette année sera l'instauration généralisée des cours d'éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle. (…)
Des contacts ont d'ores et déjà eu lieu avec les différentes fédérations de centres de planning familial qui sont, à mon estime, les acteurs les plus compétents pour ce type d'intervention.
La base théorique et le cadre référentiel de ce programme sont au point puisqu'ils ont fait l'objet d'une évaluation menée par les équipes universitaires de l'ULB et des Facultés N-D de la Paix.
Il s'agit maintenant de définir les modalités de l'institutionnalisation de ce programme. Cela passe donc par une négociation multipartite qui intègre l'enseignement et les ministres régionaux en charge des services de planning familial. (…) »
A l’évidence, oui ! Personne ne conteste la nécessité de promouvoir le respect de soi-même et des autres, de combattre les violences dans les relations amoureuses, de prévenir les grossesses non désirées et donc les interruptions de grossesse (en augmentation comme l’ont encore souligné la députée PS Sophie Pecriaux et la ministre Eliane Tillieux en séance de commission du Parlement wallon le 18 janvier 2011), d'éviter les maladies sexuellement transmissibles comme le sida, de respecter l'identité sexuelle, etc.
Des études commandées par la Communauté française ont montré toute l’importance de la violence dans les relations amoureuses et son lien avec les stéréotypes de genre.
« Quel que soit son cadre, la violence est toujours une affaire de recherche de pouvoir sur l'autre, de satisfaction de ses attentes au détriment de l'autre. Le sentiment amoureux tend à exacerber la violence entre deux personnes : la victime acceptera plus facilement la violence de l'autre, l'agresseur jouera du sentiment amoureux pour manipuler sa victime.
La spécificité de la violence dans la relation amoureuse est aussi qu’elle reflète les stéréotypes de genre véhiculés par la société » (voir « Amour et violence chez les jeunes » dans Faits et Gestes, revue du Secrétariat général de la Communauté française, Automne 2007).
Sous le titre « Renforcer le rôle des centres de planning familial », la Déclaration de politique régionale de 2009 prévoit notamment que le Gouvernement wallon conclura « sur la base de l'évaluation des expériences pilotes de 2008, un accord de coopération avec les gouvernements de la Fédération Wallonie-Bruxelles et de la CoCoF (Commission communautaire française) afin de créer les synergies nécessaires à la mise en oeuvre rapide d'une généralisation des modules d'animation à la vie relationnelle, affective et sexuelle à l'ensemble des élèves de la Communauté française. Les acteurs de terrain spécialisés seront associés à la préparation de cet accord et à la définition d'un calendrier préparatoire en vue d'un lancement phasé dès l'année scolaire 2010-2011. Par ailleurs, un nouvel appel à projets sera lancé en 2009 pour l'organisation de nouveaux modules en 2010. »
Tandis que dans la Déclaration de politique communautaire de 2009, sous le titre « Accompagner les élèves dans leur construction citoyenne », le Gouvernement de la Communauté française s'engage à « généraliser de manière progressive, via les centres de planning familial et en partenariat avec les Régions, les modules d'animation centrés sur la vie affective et sexuelle ; le tout en collaboration avec les centres PMS et PSE. Des questions comme les moyens de contraception, l'égalité entre les sexes dans les relations affectives et sexuelles ou la violence faite aux femmes y seront abordées… »
- le Gouvernement de la Communauté française et singulièrement la ministre Marie-Dominique Simonet ont pris leurs distances par rapport au prescrit des déclarations de politique régionale et communautaire;
- l'Evras risque d'être réduite à la portion congrue dans le cadre des cellules "Bien-être" à mettre en place là où c'est souhaité;
- les centres de planning dont l'expertise est reconnue et qui sont déjà au service des écoles voient leur rôle réduit ou dilué dans celui des "acteurs de terrain";
- on se demande de quelle aide supplémentaire les directions des établissements concernés pourront réellement disposer pour jouer le rôle qu'on leur assigne.
A propos de l'expertise des centres de planning familial, la Fédération laïque de centres de planning familial vient de publier un ouvrage("Eduquer à la sexualité, un métier qui s'apprend") réalisé par trois animatrices-formatrices (Colette Bériot, Katinka in t'Znadt et Nathalie Païva).
Les auteures présentent une synthèse de 20 années d'expérience en éducation à la vie affective et sexuelle et abordent aussi bien les thèmes les plus difficiles (cultures différentes, violence, marchandisation du sexe, pornographie...) que des questions de méthodologie et de formation.
www.loveattitude.be est un beau site-portail des centres de planning familial qui illustre bien la démarche et les priorités de ces centres.
Le fait que la Communauté française est restée compétente pour certains aspects de la politique de santé (essentiellement la promotion et la prévention) et le fait que les compétences en matière d'enfance, de jeunesse, d'aide à la jeunesse et de santé ne sont pas, dans le Gouvernement de la Communauté française, aux mains d'un seul ministre, compliquent évidemment la situation.
J'ai bien une solution et je pense que d'autres que moi y pensent aussi: dès que possible, transférer à la Région wallonne, pour ce qui la concerne, la matière de la santé (essentiellement, la promotion et la prévention en matière de santé) et faire de la Région wallonne le pouvoir organisateur de l'enseignement de la Communauté française...
D’accord, ce n’est pas pour demain mais on éviterait ainsi beaucoup d'incohérence, de perte de temps et d'efficacité.
Il n'est pas inutile de relever, même si cela en devient anecdotique, que bon nombre de questions et interpellations concernant quasiment les mêmes thématiques (la santé des personnes âgées, le suicide des jeunes et des personnes âgées, la santé et l'environnement, etc., etc.) sont posées à la fois au Parlement de la Communauté française et au Parlement wallon, sans parler des mêmes débats ici et là sur le sida, les assuétudes, la pauvreté, etc., etc.
Heureusement, même si c'est peu productif, il arrive que des commissions du Parlement wallon et du Parlement de la Communauté française se réunissent ensemble pour débattre de certains thèmes...
J. Gennen, 2 avril 2011
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