Racket et harcèlement entre jeunes - Violences scolaires

Date: 
Sa, 11/12/2010

 

En séance plénière du Parlement de la Communauté française du 17 novembre 2010, une question orale de la députée MR Florence Reuter sur le thème « Augmentation des faits de racket et de harcèlement entre jeunes » a donné l’occasion à la Ministre Evelyne Huytebroeck de faire quelques mises au point.

La Ministre a redit son opposition à la création d’un centre de rescolarisation et de resocialisation cher au MR et sa volonté de privilégier la lutte contre le décrochage et l’absentéisme scolaire via des actions transversales entre les AMO et les maisons de jeunes et des synergies entre les services de l’aide à la jeunesse, les écoles ainsi que les 12 services d’accrochage scolaire.

Elle a rappelé que « les statistiques policières ou judiciaires disponibles à ce jour ne permettent pas d’objectiver une augmentation significative des faits de racket ou d’incivilités ».

Evelyne Huytebroeck a également souligné « l’importance de soutenir et développer toutes les initiatives allant dans le sens d’une plus grande mixité sociale et culturelle, d’une meilleure connaissance mutuelle et, dès lors, de relations beaucoup moins hostiles entre jeunes de différents milieux, cultures ou quartiers ».

Des établissements d’enseignement n’ont pas attendu pour se lancer dans une réflexion et des actions auxquelles sont associés les élèves. Ainsi, parmi les actions les plus médiatisées, on peut citer celles du Sacré-Coeur de Lintdthout, de l’Institut Paul-Henri Spaak de Bruxelles (création d’une cellule « racket »),de l’Athénée Robert Gruslin de Rochefort (un projet « école démocratique » avec l’aide du formateur Jean-Luc Tilman, l’auteur de « 13 stratégies pour prévenir la violence à l’école »), sans oublier les actions de l’ASBL Non-Violence à l’Ecole.

(Il y a chez Madame Françoise Tulkens, Juge et Présidente de Section à la Cour européenne des Droits de l'Homme, une remarquable connaissance du droit et en particulier des droits de l'homme et un grand sens de l'écoute. Elle a présidé la Table Ronde dont le rapport ("Quelles priorités dans les réponses à la délinquance juvénile") a été présenté, il y a quelque temps. Un rapport qui a fait l'objet de débats en séance de la Commission de la Jeunesse et de l'Aide à la Jeunesse du Parlement de la Communauté française du 11 octobre 2010)

Violence scolaire, encore...

Toujours à propos de violence scolaire, le lundi 16 novembre 2010, en séance de la Commission de l’Education du Parlement de la Communauté française, le député  Hervé Jamar (MR lui aussi...) avait interpellé la Ministre Marie-Dominique Simonet sur ce thème.

La Ministre a ainsi eu l’occasion de rappeler notamment le rôle des services de médiation et des équipes mobiles, l’existence du plan Pagas (« le plan d’action visant à garantir un apprentissage serein » dont l’ambition est de coordonner l’action des différents intervenants dans l’école).

La Ministre travaille avec sa collègue Fadila Laanan à la mise en place de cellules de bien-être dans les écoles. Elle a mis en évidence le plan Pumas, une des mesures du plan Pagas, en cours d’élaboration (« plan d’assistance en milieu scolaire » lors de cas graves de violence), le numéro vert destiné aux professionnels de l’école confrontés à des faits de violence, etc.

Elle a ajouté : « Nous avançons également dans le dossier de la formation des élèves à la médiation scolaire et à la délégation d’élèves. (…) Que ce soit dans le fondamental, dans le primaire ou le secondaire, les écoles qui ont instauré des systèmes qui permettent aux élèves de s’impliquer et d’assurer eux-mêmes la médiation entre condisciples, obtiennent des résultats impressionnants ». 

Une expérience à étendre, selon la Ministre car « elle forme les élèves à la citoyenneté, les responsabilise et leur permet de comprendre les raisons de certaines règles, de certains thèmes (la propreté dans les toilettes, les méfaits de la violence, etc.) ».
Et Marie-Dominique Simonet d’ajouter : « Bien entendu, les élèves médiateurs sont toujours accompagnés des équipes pédagogiques car certains cas dépassent le cadre de l’intervention des élèves médiateurs ». Heureusement pour ces élèves !
 

Elle a annoncé que l’Observatoire de la violence scolaire serait opérationnel dans le courant de l’année 2011.

A l’évidence, les ministres ne se croisent pas les bras. Leur action ne peut qu’améliorer les choses. De là à conclure que cela peut suffire…
Que certains jeunes transportent à l’école entre eux et contre les plus faibles, la violence de la société dans laquelle ils vivent, c’est un fait. Mais il y a aussi, comme le soulignent les spécialistes, une violence contre l’école, contre une scolarité en perte de sens, contre un système scolaire qui juge, qui relègue et contribue à la destruction de l’image de soi, par l’échec et le redoublement.

C’est évident aussi que des conditions socio-économiques défavorables, une cellule familiale en morceaux, l’absence de perspectives d’emploi pour le jeune mais aussi pour ses parents et d’autres ingrédients bien connus, ne peuvent qu’entraîner des pertes de repères et des réactions violentes chez certains jeunes.

« L’école, un lieu de souffrances » titrait le Soir du 22 novembre 2010 (une généralisation que d’aucuns pourraient estimer abusive…) pour présenter le rapport d’activité de Bernard de Vos, le Délégué général aux droits de l’enfant, lequel met notamment en évidence l’augmentation des plaintes concernant l’école en matière d’inégalités, de discriminations et d’exclusions pour les plus faibles. Sans parler des problèmes liés au transport scolaire

Sans oublier que des enseignants se sentent aussi victimes et en manque d’autorité, d’estime de la part des élèves et… de leurs parents.

On ne peut pas tout et tout de suite. En attendant que la situation en amont de l’école s’améliore, il faut agir aussi au sein de celle-ci…

Dans les écoles où la réflexion sur la violence associe les élèves, libère un espace de parole et encourage l’autodiscipline et le respect de l’autre, la violence diminue…
Mais il faut aussi du temps, du personnel, un encadrement, une charte scolaire, un projet éducatif et stable qui s’inscrit dans la durée, des budgets publics pour soutenir le tout…
Il faudrait aussi beaucoup de Pierre Mathues (professeur, animateur, conseiller pédagogique qui se met « seul en scène pédagogique » avec « Silence dans les rangs »).

A Nanterre, dans les Hauts-de-Seine, le Collège Evariste-Gallois cumule les difficultés dans un environnement socio-économique dans lequel dominent la pauvreté, le chômage, l’instabilité sociale, l’absence de mixité sociale et de mauvais résultats scolaires.

Comme le souligne le Monde Magazine du 3 octobre 2009 sous la plume de Pascale Kremer, la communauté éducative a fait un gros effort pour expliquer les règles, écouter les élèves, enseigner autrement et multiplier les initiatives pour lutter contre la violence scolaire. Et Pascale Kremer de préciser : « Pas de miracle, un équilibre toujours fragile, mais le plaisir de l’école retrouvé pour certains élèves et professeurs ».

Et il faut commencer tôt. Serge Tisseron a créé un jeu de rôle pour les classes maternelles, un jeu de rôle qui permet d’intervertir les rôles entre enfants. Des dizaines d’enseignants ont été formés pour l’utiliser. Un jeu de rôle qui permet aussi de mettre des mots sur des situations vécues, comme des images violentes vues à la télévision ou ailleurs.

Combats de catch et jeux violents...

(A l'évidence, les cours de récréation de certaines écoles maternelles ou primaires ne sont pas aussi calmes que lorsqu'il y a une représentation du Théâtre de la Cave comme ici, à Vielsalm, lors du Rassemblement des Sorcières 2010)

 Répondant à une question du député cdH Pierre Migisha sur « les combats de catch dans les écoles primaires » et autres jeux violents, en séance plénière du Parlement de la Communauté française du 27 octobre 2010, la Ministre Marie-Dominique Simonet a rappelé l’existence de groupes de travail consacrés à cette problèmatique et constitués d’acteurs du terrain dont les travaux doivent présentés et débattus lors d’une troisième ( ???) table ronde qui sera organisée dans le courant du premier trimestre 2011.

Ces groupes de travail sont axés, l'un sur prévention et la sensibilisation, l'autre sur l'articulation entre la prévention et l'intervention et le troisième sur les interventions de crise...

Dans sa réplique, Pierre Migisha a quand même souligné qu’il ne fallait pas généraliser et que ces jeux n’étaient pas pratiqués partout…

Encore heureux ! Car de plan en plan, de groupe de travail en groupe de travail et de table ronde en table ronde, on n’en sortirait jamais…

Les moyens mis en œuvre chez nous sont heureusement aux antipodes de la démarche de la mairie de New York qui a joué le tout-sécuritaire à l’école avec une police locale qui a quasiment envahi les écoles et y a géré la discipline, avec des résultats peu satisfaisants.

Au point que la Ville remet en cause cette démarche (voir l’article publié dans le Monde diplomatique de juin 2010 par Chase Madar : « New York remet en cause le tout-sécuritaire à l’école »)!

Et les dispositifs retenus par la Communauté française n’ont rien à voir avec le centre de rescolarisation et de resocialisation que les députés MR défendent à nouveau, sans succès heureusement.

C’est ce que Sarkozy veut faire en France avec les ERS (établissements de réinsertion scolaire). Les premiers incidents sont apparus, il y a quelques semaines, dans le Collège Volney, à Craon qui accueille un établissement de réinsertion scolaire.

Voici ce qu’en dit Maria Ines, secrétaire nationale du SNPES-PJJ : « Professionnels de l’éducation spécialisée, psychologues, enseignants, infirmiers, tous savent qu’on ne regroupe pas les gens ayant les mêmes symptômes sans former des ghettos. Avant même de vouloir leur apprendre le respect des règles, il faut écouter leur souffrance, car ils souffrent, au moyen d’un accompagnement très individualisé. » (le Monde du 19 novembre 2010).
Cet accompagnement très individualisé et dans la durée, c’est aussi ce qu’ont souhaité beaucoup de professionnels ayant participé à la Table ronde pilotée par la Fondation Roi Bauduin. Des équipes d’éducateurs devraient être opérationnelles dans les mois qui viennent…

A propos de la violence, une dernière réflexion encore, celle de la criminologue Els Dumortier, dans le Soir du 8 décembre 2010 : « La violence est un problème, mais il ne faudrait pas désigner les jeunes comme des boucs émissaires. Il y a quelques mois, après une agression qui avait eu lieu dans une école gantoise, quand j’ai vu comment les caméras de télévision se ruaient sur les élèves pour avoir des images, j’étais vraiment choquée. C’est comme s’il y avait une soif de violence. Ça se vend bien manifestement… Tout cela pour dire qu’on devrait se poser la question de savoir comment nous réagissons à toute cette violence. Ce ne sont pas les jeunes qui la créent, elle est véhiculée et parfois même glorifiée, notamment dans des films. Et qui réalise ces films et gagne beaucoup d’argent avec ça ? Des adultes. »

Il y a eu une question sociale. Il y a aujourd’hui une question scolaire qui va s’amplifier avec l’augmentation des inégalités scolaires.

A propos des jeunes et de certains phénomènes de délinquance, je renvoie le lecteur à la lecture du rapport de la Table ronde et à la publication de l'Institut Emile Vandeverlde,"les questions de sécurité - Pour un débat objectif et sérieux"', sous la plume de Guillaume de Walque et Xavier Bodson (février 2010).

J.G., 8 décembre 2010

Photo du moment

Agenda

  • 07-04-2013

    C’était le dimanche 7 avril 2013. Jean Maquoi, le frère du docteur Luc Maquoi à l’origine du Centre Médical Héliporté de Bra-sur-Lienne, ne cachait pas sa joie et son émotion : le soleil et près de 2000 personnes avaient répondu à l’invitation de son comité organisateur.

    Plus de 850 repas ont été servis à cette occasion !

    Jean Maquoi et son équipe peuvent compter sur 130 bénévoles, sur la collaboration des pompiers de Hamoir et de la police fédérale de même que sur l’aide d’entreprises de transport et d’autres firmes de la région.

    L’intégralité des bénéfices de cette belle manifestation est versée au CMH de Bra-sur-Lienne.

  • 04-01-2013 - 30-01-2013

    Le CMH de Bra-sur-Lienne a les honneurs d’une exposition photographique « Au coeur d’une zone rouge », à la Maison du Tourisme du Pays de Herve.

    On peut y admirer les superbes photos réalisées par Valentin Bianchi lors d’interventions réelles du CMH (en 2012, le CMH est intervenu plus de1000 fois !).

    Excellente idée que cette belle exposition car elle fait vivre au quotidien et sur le terrain les interventions d’un trio de choc : le médecin spécialiste, l’infirmier spécialisé en aide médicale urgente ainsi que le pilote de l’hélico.

A votre bonne attention

  • Voici quelques informations communiquées par le CMH de Bra-sur-Lienne.

    Trois interventions héliportées par jour !

    Au cours de l’année 2012, le Centre Médical Héliporté de Bra-sur-Lienne a réalisé 1028  missions par hélicoptère à la demande du 112.

    Pour la seconde année  consécutive, le CMH dépasse le seuil des 1000 interventions héliportées. Cette donnée confirme la place de l’hélicoptère dans les moyens de secours disponibles en Belgique.

  • Le best-seller surprise qui secoue la Flandre enfin traduit en français

    « Comment osent-ils ? La crise, l’euro et le grand hold-up » de Peter MERTENS (président du PTB) en collaboration avec David Pestieau, avec une préface de Dimitri Verhulst (Auteur de La merditude des choses). Quelques syndicalistes l’ont déjà lu et vous le recommandent.

    « Peter Mertens, comme nous, a raison de s’étrangler d’indignation dans son livre sur “La crise, l’euro et le grand hold-up”. (…) Oubliés le sauvetage des banques, les causes de l’endettement et de la crise. Ils ont réussi a retourner la situation et ils essaient maintenant de nous convaincre que tout cela, c’est notre faute : on gagne “trop”, notre sécu est “trop généreuse”, nos pensions “impayables”, nos services publics “pléthoriques”, nos chômeurs “paresseux”. (…)

  • Je lis sur ma page d’accueil Facebook les témoignages de Renée Gaspard, Patrick Davin, Gaston Blanchy, Jean-Claude Marcourt, Jean-Pierre Alexandre, Nathalie Bailly, André Brunelle, Christelle Thomas et de tant d’autres.

    Que dire encore ? Nos pauvres mots ne peuvent pas suffire devant ce terrible drame et tant de souffrance…

    Nous ne pouvons qu’exprimer notre révolte mais aussi notre empathie, notre solidarité. Au moins, elles n’ont pas de frontière même linguistique !
    J.G., 14 mars 2012

Copyright La chronique parlementaire 2009 - Editeur responsable Jacques Gennen

Site développé par Tictemium